Qui est donc ce beau guitariste (brun) californien nommé Cory Hanson ? Si comme moi vous êtes amateur de son ami, l’étonnant beau guitariste (blond) californien Ty Segall vous le connaissez peut-être car il faisait partie du backing band d’un des nombreux albums de ce dernier, Emotional Mugger”. Ils ont également sorti ensemble un single acoustique à double guitare très sympathique “She’s a Beam” dont la performance ne cessera de m’impressionner.

Pour autant, réduire le charmant Cory à ses collaborations serait réducteur car il est aussi, et surtout, le leader du fantastique groupe Wand, actif depuis 2013 qui mélange à la fois la scène garage rock-psyché californienne (recoucou Ty Segall, coucou Thee Oh Sees…) à des ambiances shoegaze-noisy du plus bel effet. Si vous n’avez rien compris à la phrase précédente, le plus simple c’est d’écouter quelques extraits ! 

 

En 2016, le musicien débute une carrière solo avec “The Unborn Capitalist From Limbo” album assez déroutant tant l’artiste rompt totalement avec les sonorités de Wand pour se consacrer à une épopée folk acoustique avec quelques chœurs féminins et surtout une omniprésence des violons qui apporte à la fois une touche mélancolique et aventureuse.
On peut prendre en exemple le morceau “Garden Of Delight” qui mêle une rythmique guitare/batterie qui fait penser à un trot et une telle mélodie aux cordes qui donne l’impression d’être à dos de cheval, au soleil couchant, arpentant le désert californien. 

Pour son deuxième album solo “Pale Horse Rider”, Hanson approfondi le sujet en gardant un côté folk, l’agrémente d’un petit côté psyché mais va surtout chercher ses influences chez Neil Young, en apportant ses touches personnelles, mélangeant les genres qui composent le roots rock américain afin de créer sa propre version de l’Americana version psyché-folk teinté de pop “désertique”. Certains morceaux (Limited Hangout et Vegas Knights par exemple) me font penser à ce qu’auraient pu être des morceaux de “Sweetheart of the Rodeo” des Byrds, si ces derniers avaient passé un peu plus de temps à se balader dans le désert au crépuscule…
Sans oublier la magnifique balade popéponyme Pale Horse Rider qui avec ses chœurs et son violon rappelle le premier album, ni l’avant-dernière piste “Another Song From the Center of the Earth” et son outro instrumentale dans laquelle Cory ressort sa guitare électrique à effets pour rappeler à ses auditeurs que son groupe Wand est loin d’être derrière lui. 

 

Mais alors que l’on s’attendait potentiellement à d’autres expérimentations de ce genre pour son prochain album, le guitariste californien sort en juin l’album “Western Cum” (oh mais quelle vulgarité…) et là c’est l’explosion dans les oreilles… 

L’album s’ouvre sur “Wings” et quelle entrée en matière ! Les guitares se lancent d’emblée dans des riffs puissants et énergiques qui introduisent la voix douce de notre guitariste californien, les instrumentations accompagnent la voix douce du chanteur progressivement jusqu’à terminer en outro à base de solos de guitare très typé hard-rock, lancinants, acharnés et chargés de ce qui semble être de l’électricité pure, comme en témoigne le long fil qui part de l’ampli à travers le désert sur la pochette de l’album… 

 

 

Ni une ni deux (ah si du coup), la deuxième piste s’enchaine sur ce qui semble être une continuité dans les riffs lancinant, qui se coupe brusquement pour laisser le chanteur (avec la voix toujours aussi douce) dévoiler son premier couplet qui une fois terminé, disparaît devant les mêmes riffs accrocheurs du début. L’aller-retour se poursuit dans cette structure en enchainant rythmique électrique et voix cristalline, tellement épique qu’on oublie presque que la chanson nous raconte l’histoire de quelqu’un qui veut tuer une mouche chez lui… (sauf si on regarde le clip)  

Alors qu’on pensait avoir tout entendu (et tout vu), on pensait que l’album de Hanson allait être une sorte d’hommage/réinvention du bon vieux hard-rock à l’américaine (en plus on voit le titre on se dit ça pourrait…coller) quand tout à coup on atterrit bien sur les fesses en écoutant la suite. 

La troisième piste intitulée Persuasion Architecture” continue de faire monter l’excitation auditive en renforçant ce parallèle entre brutalité et délicatesse. D’emblée le groupe crache un tonnerre heavy que Motörhead ne renierait pas avant de s’adoucir progressivement pour se laisser emporter par un rythme aérien type ballade que l’on pourrait aisément utiliser pour une séance de relaxation. Mais ce n’est que le calme avant la (deuxième) tempête instrumentale.
L’artiste joue de ces ralentissements/accélérations brusques tout au long de l’album, changeant de tempo non seulement dans les pistes mais aussi dans l’album, ce qui donne de belles surprises lors de son écoute intégrale.  

 

Ainsi se croisent Twins la ballade country-pop teinté de steel guitar : 

Horsebait Sabotage qui commence en mélange de rock sudiste à la Ted Nugent et de glam-rock à la T.Rex qui se finit en ambiance psyché-pop qui rappelle ce que peut faire Wand : 

Mais aussi “Ghost Ship” la magnifique ballade country qui rappelle (un peu) le second album avec les guitares électriques en plus et “Driving Through Heaven” sorte de longue piste qui mixe foudroiement mélodique et expérimentations/ambiances sonores, le tout étalé sur un peu plus de 10 minutes… 

 

39 minutes de pur plaisir si tant est que l’on apprécie les solos de guitare à l’ancienne teintés de psychédélisme des racines de l’ouest, le tout emporté par une tornade au milieu du désert. En tout cas, les sensations sont au rendez-vous et si Cory était avec nous et nous demandait “Alors heureux·se ?” on lui répondrait par la positive assurément. 

Une question demeure : mais que peut bien aspirer la mouche sur la couverture ?